La frénésie constructrice de l’Inde lui fait confondre vitesse et précipitation. Des aéroports et des ponts s’écroulent, se faisant les marqueurs de constructions hâtives ou d’un manque de financement pour entretenir de telles infrastructures. Le Premier ministre étrenne les inaugurations, sans plus afficher son inquiétude pour les drames qui surviennent dans le pays en raison de ces éboulements.
À New Delhi, l’aéroport voit un ballet peu habituel. En raison des difficultés du terminal 1, les ouvriers du bâtiment font concurrence aux touristes. Face aux précipitations que convoque la mousson, la stabilité des sols est mise à rude épreuve et certains bâtiments ne parviennent pas à y faire face. En ce qui concerne l’aéroport, c’est un de ses auvents qui s’effondre, blessant par la même occasion huit personnes et occasionnant la mort d’une autre. Pourtant, la bâtisse venait d’être rénovée et inaugurée le 10 mars par Narendra Modi, le Premier ministre indien.
Un accident qui marque les esprits et échauffe l’opposition, qui dénonce cette « négligence criminelle » que relaie Le Monde dans ses colonnes. Une énumération macabre des aéroports qui s’écroulent à travers le pays continue d’être relayée, tandis que de nombreux ponts s’effondrent eux aussi. Rien que pour l’État du Bihar, quatorze ponts se sont effondrés. Alors, quinze ingénieurs ont été suspendus, dans l’attente d’informations complémentaires à la suite d’une inspection sur les vieux ponts de l’état.
Ces drames viennent remettre en cause la réalité des ambitions du gouvernement de Narendra Modi. Souhaitant rattraper le retard de l’Inde en ce qui concerne ses infrastructures, ceci se fait au prix lourd et semble oublier de s’assurer de la durabilité des moyens engagés. Avec sa promesse de garantir un pays développé à l’horizon 2047, le Premier ministre semble brasser plus d’air qu’autre chose. Tout du moins ses constructions s’effondrent tels des châteaux de cartes.
Pourtant, les moyens investis ne manquent pas. Avec une dépense allouée aux infrastructures dépassant les 5% du PIB sur les années 2020 et 2024, la part accordée dans le pays serait supérieure à « de nombreux pays plus riches » comme le souligne Suyash Rai, rapporté par le média français. Malgré les importants investissements de départ, le budget pour maintenir l’état de ces infrastructures n’est quant à lui pas débloqué. Alors, celles-ci tendent à vite devenir vétustes.
Malgré ces déboires, le Premier ministre continue de faire bonne figure en inaugurant quais de gares ou infrastructure portuaire. De quoi faire les choux gras de l’opposition, qui le surnomme l’ « inaugurateur en chef ». Selon le spécialiste des études de marché en Inde, Mordor Intelligence, le pays doit cependant encore « améliorer ses infrastructures pour atteindre son objectif de croissance économique de 5 000 milliards de dollars d’ici 2025. » La course n’a pas fini d’être effrénée.
France-Soir