Dans un communiqué commun, la gauche a voulu mettre la pression sur le chef de l’Etat, qui n’a pas appelé le NFP, arrivé en tête des élections législatives dimanche. Elle a jugé que s’il « persistait », ce serait « une trahison de l’esprit de notre Constitution et un coup de force démocratique ». Le leader des Insoumis Jean-Luc Mélenchona quant à lui accusé Emmanuel Macron de « bloquer la situation aujourd’hui pour garder le pouvoir le plus longtemps possible ».
Ragaillardis par leur succès aux législatives, les députés de gauche ont débarqué en force au Palais Bourbon, revendiquant Matignon les uns après les autres, même s’ils sont loin de la majorité absolue (289) avec les quelque 190 sièges obtenus dimanche.
Le patron du PS Olivier Faure, arrivé avec les élus socialistes, dont l’ancien président François Hollande, s’est ainsi dit « prêt à assumer » la fonction de Premier ministre « dans le dialogue avec (ses) partenaires » du NFP, une mise en garde face aux velléités de Jean-Luc Mélenchon d’envoyer un Insoumis à Matignon.
Les composantes de la gauche ont promis de proposer un nom de Premier ministre et une équipe d’ici « la fin de semaine », selon plusieurs dirigeants.
Les conciliabules se multiplient donc et une stratégie semble se dégager dans leurs rangs: un exécutif restreint à la gauche mais « une assise plus large à l’Assemblée », a détaillé l’ex-président des députés socialistes Boris Vallaud sur France Inter. « Je ne veux pas travailler dans un gouvernement où il y aurait des macronistes », a prolongé l’écologiste Sandrine Rousseau à son arrivée au Palais Bourbon.
Rapports de force internes
Emmanuel Macron, qui reçu mardi soir le président du Sénat Gérard Larcher, reste en retrait depuis dimanche. Il a seulement maintenu Gabriel Attal à son poste de Premier ministre « pour le moment », et se rend mercredi à Washington pour deux jours de sommet de l’Otan, tandis que le camp macroniste rejette les revendications de la gauche.
« Je ne conteste pas la possibilité pour la gauche républicaine de gouverner ou de participer à un gouvernement. Mais à 100 sièges de la majorité absolue (…) il faut être réaliste », a affirmé le secrétaire général de Renaissance, Stéphane Séjourné, dans une tribune au Monde. Le néo-député préfèrerait une « majorité de projets », mais sans LFI ni Jean-Luc Mélenchon.
Infographie AFP
A gauche, les rapports de force internes seront particulièrement décisifs dans les négociations, Insoumis comme socialistes tentant âprement de gonfler leurs rangs pour peser dans la désignation du Premier ministre potentiel. Mardi, Boris Vallaud (PS) a évoqué un contingent de 65 à 70 députés socialistes, quand Mathilde Panot (LFI) a assuré que LFI pourrait avoir un groupe « autour de 80 députés ».
Autre dossier en passe de s’ouvrir, celui des postes-clés de l’Assemblée et de la présidence, que Yaël Braun-Pivet espère conserver.
Sandrine Rousseau aussi s’est dite intéressée mardi, tout en appelant comme l’ensemble de la gauche à exclure le RN de toutes les fonctions exécutives en établissant un « cordon sanitaire ».
Le RN visé par la justice
Au sein de la macronie, certains regardent à droite, à l’image du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. D’autres, au MoDem notamment, aimeraient ranimer le coeur social-démocrate qui avait porté Emmanuel Macron vers le pouvoir en 2017. De là à imaginer une grande coalition qui exclurait LFI et le Rassemblement national, et qui irait du PS aux LR ?
En tout cas, Edouard Philippe, dont le groupe Horizons compte 27 élus, a plaidé sur TF1 pour un « accord technique » entre le camp présidentiel et Les Républicains (LR). Refusant de parler de coalition, le président LR des Hauts-de-France, Xavier Bertrand a revendiqué simultanément sur France 2 Matignon pour son parti, qui compte une soixantaine d’élus, et la formation d’un « gouvernement de rassemblement » afin de « mettre un coup d’arrêt à LFI ».
En attendant, Gabriel Attal entend se montrer à la manoeuvre. Il a réuni mardi matin les députés Renaissance, et convié à Matignon tous les parlementaires de la majorité en fin d’après-midi.
Du côté du Rassemblement national, la déception a laissé place aux premiers règlements de compte. Le directeur général du parti Gilles Pennelle, artisan du fameux « plan Matignon », censé prévoir toute la logistique en cas d’élections législatives anticipées, a démissionné après le revers du parti dimanche. Le RN est aussi confronté à un nouveau déboire avec l’annonce par le parquet de Paris d’une information judiciaire sur des soupçons de financement illégal de la campagne présidentielle de Marine Le Pen en 2022.
Les Nouvelles Calédoniennes