C’est avec le sourire que Juliana, Kenji et Jessica accueillent les clients qui passent leur porte. « Il faut garder le moral, c’est la positive attitude ici ! » affirme la pétillante Jessica, vendeuse de la boulangerie Le Mitron. Pourtant, ce commerce, présent depuis 18 ans dans le village, a été fortement touché par les exactions du mois de mai, puis de juin. « Nous avons perdu 40 % de notre chiffre d’affaires, constate le patron du groupe Les Mitrons, Pascal Catteaux. Notre point de fabrication au village a été détruit, deux constructions modulables de 40 m2 contenant notre stock ont été brûlées. Nous avons rouvert il y a un mois parce que nous pouvons produire sur Nouméa. » Quelques salariés du groupe sont encore au chômage. « Nous reconstruisons, mais nous n’avons pas encore perçu les aides du gouvernement, le chômage, les assurances… Nous avons mis sept millions de notre poche. Mais ce qui compte, c’est que nos salariés sont payés, c’est l’essentiel.«
« On est toujours debout »
Il reste deux boucheries sur quatre dans le village de Païta, dont la Boucherie Rolland, où œuvre Juliana. La clientèle est donc au rendez-vous, mais les effets de la crise sur les finances des ménages se font déjà ressentir. Photo Aurélia Dumté
Juliana, de la boucherie Rolland, se sent reconnaissante. « Merci ! On est toujours debout, on n’est pas mort. Nous avons eu des dégâts, la porte cassée, de la viande volée, la caisse cambriolée. Mais nous n’avons pas brûlé. » Le message est le même chez tous les commerçants de cette partie du village. Et pour cause, après le centre médical et jusqu’à la mairie, tous les commerces et services sont détruits le long de la rue principale.
Du centre médical jusqu’à la mairie, de très nombreux commerces et services ont été détruits au mois de mai, mais aussi courant juin. Photo Aurélia Dumté
Alors oui, « il y a du monde, il ne reste que deux boucheries sur quatre. Même en termes d’épiceries, il ne reste plus grand-chose. Mais il manque quelque chose, ça manque de vie. » Pascal Catteaux, du Mitron, constate lui aussi : « on sent la morosité, l’incertitude, le manque de sécurité…«
Des boîtes de pièces
Ce que ressentent également les commerçants, ce sont les finances des clients qui baissent. Maryline, de la Papeterie de Païta, se réjouit « qu’ils m’aient épargnée, ils n’ont pas tout volé, j’ai pu sauver les imprimantes, du matériel, c’est ce qui m’a permis de rebondir. » Après deux mois de fermeture, Maryline a rouvert mi-juillet. « Je reçois beaucoup de messages de soutien, mais les gens ont des besoins différents en ce moment.«
Les commerces au sud du village, après le rond-point à l’entrée de Païta, ont été cambriolés, vandalisés pour certains, mais n’ont pas été victimes d’incendies. Ils ont donc pu rouvrir. Photo Aurélia Dumté
Cet autre commerçant constate qu’avec la destruction de ses confrères, « on gagne de la clientèle, mais les gens n’ont plus les moyens. Ils viennent avec des boîtes de pièces, mais toujours avec le sourire. On verra le mois prochain, l’avenir proche est incertain. »
Ouverture prochaine d’un supermarché vers l’Arène
Les visiteurs se font rares au village à cause de l’arrêt des transports en commun et du manque d’attractivité avec la fermeture et la destruction des grandes surfaces, de l’agence postale, des banques. Un hypermarché, avec une galerie commerciale, doit ouvrir ses portes prochainement du côté de l’Arène du sud. Une bonne nouvelle pour les habitants de Païta, une information plus inquiétante pour certains petits commerçants du village. Comme pour la Boucherie de la place. La boutique a subi quelques dégâts, « mais l’équipe est soudée et contente, on travaille bien, on sent davantage d’activité avec la fermeture du Korail, constate Kenji, le patron. Avec l’ouverture du Super U, on imagine qu’il y aura des répercussions. » Pour autant, ce commerçant, comme ses voisins, garde le moral. « Nous sommes les seuls rescapés !«
Les Nouvelles Calédoniennes
Source www.lnc.nc