Victoire importante dans la lutte contre la corruption version hexagonale. En conflit depuis plusieurs mois avec le gouvernement, Anticor a finalement retrouvé son agrément jeudi. Une décision forcée prise par Attal, juste avant qu’il ne quitte ses fonctions.
L’arrêté signé par feu le premier ministre marquera l’un de ses derniers actes. Il intervient après que la justice ait sommé le gouvernement, la veille, de réexaminer sous 24 heures la demande d’agrément sous peine d’une astreinte financière de 1 000 euros par jour de retard. En effet, le tribunal administratif de Paris avait, dès le 9 août, ordonné le réexamen dans un délai de quinze jours, chose qui n’avait pas été exécutée, poussant la justice à demander des sanctions financières afin de forcer la décision.
Selon l’arrêté rendu public, Anticor remplit bien les conditions nécessaires pour obtenir cet agrément, agrément désormais renouvelé pour une durée de trois ans. Il permet à l’association d’exercer les droits reconnus à la partie civile, en intervenant dans des procédures judiciaires, en cas notamment d’inaction du parquet, un pouvoir clé dans certaines formes de corruption. « Cette décision récompense le combat acharné que nous menons devant les juridictions administratives depuis tant de mois. C’est une victoire pour la société civile », a déclaré Vincent Brengarth, l’avocat d’Anticor.
Créée en 2002 afin de lutter contre la « corruption » et restaurer une forme d’éthique politique, Anticor avait perdu son agrément en juin 2023 suite à une décision du tribunal administratif, confirmée depuis en appel. Depuis 2015, l’agrément permettait à l’association de se constituer partie civile dans certaines affaires sensibles, un rôle exercé déjà dans de nombreuses procédures, notamment celles liées à l’attribution controversée de la Coupe du monde de football 2022 au Qatar, l’enquête pour prise illégale d’intérêts visant Alexis Kohler, secrétaire général de l’Élysée, ou encore la vente de la branche énergie d’Alstom à General Electric.
Quelques sujets embarrassants pour le pouvoir…
Cette suspension d’agrément avait suscité de vives critiques. Emmanuel Macron s’était d’ailleurs exprimé de manière critique à l’égard de l’association devenue gênante. En 2023, lors de l’émission « Complément d’enquête », le président avait fustigé Anticor, affirmant que l’association menait des procédures à répétition, pouvant nuire à la réputation des personnes visées, même en l’absence de condamnation.
Anticor, qui revendique quelque 7 000 adhérents, avait déposé une première demande de renouvellement de son agrément en juin 2023, demande à laquelle le gouvernement n’avait pas répondu, et qui de fait valait refus implicite. Contestant par la suite cette non-réponse devant le Conseil d’État et le tribunal administratif. Puis en janvier, une nouvelle demande d’agrément avait été introduite, mais une fois encore, le silence radio du gouvernement qui conduit une fois encore à un refus tacite. Finalement, le tribunal administratif avait été ressaisi par l’association en août, un refus qui finit par une décision favorable en ce début septembre.
Une issue perçue comme avancée majeure dans la lutte contre la « corruption ». L’association Sherpa, également impliquée dans ce combat face aux crimes économiques, a salué cette victoire sur X, en soulignant l’importance pour la société civile de la transparence des institutions publiques.
G.L