Un drapeau français flottant aux côtés de celui de Kanaky et des voisins du Pacifique. Pour un meeting politique indépendantiste, le décor n’est pas banal. Il est à l’initiative des habitants de ces résidences sociales de la Vallée-des-Colons qui ont tenu à hisser les couleurs de toutes les terres et territoires d’origine de ces riverains avant d’accueillir la venue de la candidate Omayra Naisseline et de sa suppléante Laurie Humuni, en lice pour le second tour des législatives dans la première circonscription.
« Ce mât avec les drapeaux qui représentent toutes nos nationalités et notre métissage, nous le soulevons dans la paix et dans la confiance en la jeunesse », glisse un locataire de ce secteur où aucun barrage n’a été érigé depuis le début des exactions et où le calme s’est vite rétabli grâce aux « discussions » entre voisins où « l’humain a été placé au cœur » des débats. C’est dans ce contexte apaisé que la candidate nationaliste a pris la parole, devant une soixantaine de sympathisants et curieux, ce vendredi après-midi, pour son avant-dernier meeting de campagne.
« Il faut se relever »
« C’est un devoir de mémoire de se lever pour tous les vieux qui ont fait le travail avant nous ainsi que pour ceux qui sont tombés depuis le 13 mai, insiste Omayra Naisseline, selon qui l’économie de « notre petit Caillou du Pacifique », frappé par les crises mondiales successives (Covid, guerre en Ukraine…) avait déjà « un genou à terre ». « Depuis la crise institutionnelle et politique du 13 mai, le pays a les deux genoux à terre. Cela ne veut pas dire qu’on est tombés, mais qu’il faut se relever pour reconstruire notre pays sur de bonnes bases et de bonnes valeurs. »
Les drapeaux de toutes les nationalités des habitants de ce secteur de la Vallée-des-Colons ont été hissés. Photo Anthony Tejero
Face aux habitants, la candidate demande « pardon » au nom de la classe politique pour le « chaos » dans lequel le pays a plongé. « On n’a tous pas été à la hauteur et on a tous notre part de responsabilité à commencer par l’État qui est passé en force. Cette révolte est l’expression du peuple. On a jamais appelé à la violence et on ne la cautionne pas, mais on ne peut pas fermer les yeux sur cette expression qui est le résultat d’inégalités avec un apartheid social qui s’est encore creusé, martèle l’élue au Congrès et à la province des Îles, qui précise que le Caillou aura besoin de l’aide des pays voisins ainsi que de la France pour « reconstruire ». « C’est son devoir en tant qu’État colonial, mais cela ne pourra plus se faire comme ces dernières années. Et ce, pour une meilleure répartition des richesses. »
« Un score historique » le 30 juin
Mais encore faut-il convaincre suffisamment d’électeurs pour décrocher le siège de député alors qu’Omayra Naisseline a un retard de près de 2000 voix sur son rival Nicolas Metzdorf. C’est pourquoi sa suppléante Laurie Humuni espère mobiliser le plus largement possible d’ici dimanche, notamment auprès des quelque 10 000 électeurs encore potentiels pour le camp indépendantiste au sein des îles (7 000 voix) et de Nouméa (3 000 voix) selon ses projections.
« En 2022, nous n’étions pas au rendez-vous avec entre 50 et 80 % d’abstention car on avait encore nos esprits colonisés, mais le 30 juin, nous avons fait mouche avec un score historique jamais vu pour des législatives, se félicite la secrétaire générale du RDO (Rassemblement démocratique océanien), selon qui les deux députés sortants Nicolas Metzdorf et Philippe Dunoyer, qui ont poussé en faveur du projet de loi constitutionnelle sur le dégel du corps électoral sont les « commanditaires de ce qu’il s’est passé le 13 mai ». « Ce sont eux qui auraient dû être déportés au lieu de nos frères et nos sœurs. Il faut donc se lever le 7 juillet et être au rendez-vous de l’histoire, interpelle Laurie Humuni, qui juge bon de préciser que l’objectif de la pleine souveraineté « comprend tout le monde ». Si on place deux indépendantistes à l’Assemblée nationale, ils porteront la voix du peuple kanak là-bas. Les jeunes ont demandé le changement le 13 mai et ce changement commence le 7 juillet. Si demain, il y a l’indépendance, oui l’aéroport sera ouvert et chacun sera libre de partir, mais en tant qu’indépendantistes, nous leur demanderons de rester ici avec nous pour construire tous ensemble. »
Source Les Nouvelles Calédoniennes